Scrum, du bon sens ou contre nature?

Bonsoir a tous,

Lorsque j’ai decouvert Scrum, et l’Agilité, je me suis dit que tout ça n’était en fait que du bon sens.

Bien sûr qu’il est mieux de travailler de manière itérative, de rechercher du feedback au fur et a mesure du développement! Évidement qu’il est préférable de developper d’abord ce qui servira le plus à l’utilisateur! Et oui, si on fait confiance a l’équipe et qu’elle s’auto-organise on obtient des gens motivés et impliqués.

Alors est-ce que quelqu’un ici saurait m’expliquer pourquoi quand le Scrum Master s’en va ou quand l’entreprise fait du fake agile, le.naturel qui revient vite est celui du micro management, du command and control, des équipiers qui en font le moins possible, des livraisons qui prennent du retard, du produit qui ne correspond plus qu’à ce que le marketing a imaginé et pas au besoin de l’utilisateur.

Si l’agilité etait vraiment du bon sens, on ne verrait rien d’autre, non? Et on ne ferait pas de transfo agile, on le serait c’est tout!

Je suis perplexe…

1 « J'aime »

Oui, Scrum c’est du bon sens… mais une forme particulière de bon sens.

Selon Théorie X et théorie Y — Wikipédia , le bon sens dont tu parles est très « Y », mais le naturel de ton organisation semble être très « X ».

Si tu veux du bon sens « X », je peux te proposer des choses déjà entendues :

  • Ben évidemment qu’il faut mettre la pression aux gens, sinon ils ne se donneront jamais à fond
  • Il faut systématiquement challenger les estimations parce que les gens prennent des marges. Et si tu les laisses prendre leurs marges, ils vont occuper tout le temps qu’ils ont prédit alors qu’ils auraient pu finir plus vite.
  • Ça ne sert à rien de montrer des choses pas terminées, on sait déjà ce qui ne va pas donc c’est une perte de temps de poser la question. On montrera quand on aura tout fini.
  • Le test pour les développeurs c’est une perte de temps et d’argent, ce n’est pas une activité qualifiée donc on peut déléguer ça à des gens qui coûtent moins cher. Et de toute façon les développeurs n’aiment pas tester.
  • Les utilisateurs ne savent pas ce qu’ils veulent, donc ça ne sert à rien de leur demander. C’est nous les experts, on sait mieux qu’eux.

Ces choses sont contestables mais elles ont toutes un fond de vérité. Tout comme les croyances Y d’ailleurs : c’est mieux de compter sur la motivation intrinsèque des gens effectivement, mais c’est difficile d’avoir 100 % de gens motivés et acquis à la cause. C’est mieux d’itérer avec ses utilisateurs, mais il y a aussi un risque de tomber dans le clientélisme.

Comme souvent, la bonne attitude est quelque part au milieu. Même en étant un Y convaincu, on va forcément côtoyer des gens qui sont un peu (ou très) X, et il faut savoir leur donner un peu de X en retour, sinon on risque de ne jamais se comprendre.

3 « J'aime »

L’éducation ? Les habitudes ? Le système ?

Certains diraient que sans véritable volonté du top-management, qui d’une certaine manière insuffle la culture de l’entreprise (X, Y), un changement ne peux pas s’ancrer durablement.

Un Scrum Master qui s’en va et l’équipe qui retrouve ses bonnes habitudes, n’a probablement pas réussir à inscrire le changement dans le quotidien de cette équipe (je l’ai vécu moi-même dans mes jeunes années de SM).

Attention, je ne jette pas la pierre, ni au management, ni aux agents du changement, inscrire un changement de paradigme est extrêmement long et difficile en fonction du contexte et des « pré-requis » pour un bon Scrum (https://jp-lambert.me/devez-vous-utiliser-scrum-les-prérequis-de-scrum-8ae07d5a5b00), il a fait une bonne conf la dessus d’ailleurs.

Le conseil que je peux vous donner :

  • arrêtez de chercher à changer les organisations et les gens, changez vous VOUS, et montrer au travers de votre accompagnement les valeurs que vous défendez, suscitez l’intérêt pour influencer via l’exemple
  • proposer des manières de faire, au regard des attentes et des points de douleurs existants (ne soyez pas dogmatique), prenez le temps d’identifier les besoins et problèmes des gens (ce n’est probablement pas de mettre en place Scrum :wink:).

Je ne sais pas si cela te donne des éléments de réponses, mais c’est ce qui m’est venu en lisant vos lignes. J’ai du mal avec l’exercice écrit, je préfère l’oral. Au plaisir de pouvoir en discuter à l’occasion @Cecile.Vivant.

1 « J'aime »

Merci beaucoup Remi.
Je ne suis absolument pas dans ce genre de situation en ce moment, c’est plus une reflexion, une question que je me pose…
En.tout cas merci pour cette longue réponse.

1 « J'aime »

Je dirais culturel plus que naturel.

Oui c’est mieux formulé ainsi !

Les changements de paradigme prennent du temps, et sont toujours déclenchés par une incompatibilité entre la modélisation que l’on se fait d’un système et les incohérences que cette modélisation engendre.

Le passage du géocentrisme (la terre est le centre de la galaxie) à l’héliocentrisme (le soleil est le centre de la galaxie) s’est fait parce que le second paradigme expliquait de façon beaucoup cohérente pas mal de mouvements célestes. Pour autant, ce changement à mis bien plus de temps qu’on s’accorde à penser. Ce que Copernic a théorisé n’est devenu légitime qu’à l’époque de Newton, soit environ deux siècles plus tard (et je ne parle même pas des théories qui existait déjà dans l’antiquité, surtout parce qu’elles étaient plus poussé par de une approche théologique que scientifique pour le coup). Tout ça parce que derrière se cache des problèmes de pouvoirs tant dans le domaine scientifique que politique et religieux, sans compter les remises en question purement existentiel que l’on subit quand ce qu’on tient pour acquis est prouvé comme tout simplement faux.

Le passage d’un paradigme tayloriste à un paradigme de l’entreprise « agile » n’est évidemment pas exempt des même résistances (management cherchant à garder sa place, système éducatif coincé dans le paradigme précédent, habitus de la masse de travailleur actuelle (utilisation non péjorative)). Ce qui est décrit dans le post original est simplement une résistance naturelle à ce changement de paradigme parce que les instances dirigeantes se contentent du model tayloriste pour expliquer leur monde pour X raisons.

1 « J'aime »